En marche vers un « grand format » du principe de neutralité du service public pour conforter le respect des principes de la République

Par Audrey-Pierre SO’O

Doctorant en droit public à l’URCA – CRDT

Il faudra se borner à un état des lieux du principe de neutralité et aux perspectives de changement esquissées par l’article 1er du projet de loi confortant le respect des principes de la République sans s’autoriser aucune opinion.

Neutralité-indifférence :  combattre les discriminations. — La neutralité peut apparaître comme une neutralité-indifférence interdisant ainsi toute discrimination entre les usagers du service public en fonction de leurs opinions politiques, religieuses, philosophiques ou de leur race. Par ce biais, la neutralité se rapproche du principe d’égalité dont elle a pu apparaître comme un corollaire héritant même de sa valeur constitutionnelle. Aussi, le Conseil d’État dans un rapport de 2004 énonce que la laïcité se décline en trois principes : la neutralité de l’État, la liberté religieuse et le respect du pluralisme[1]. Il y’aurait alors une imbrication entre la laïcité et la neutralité qui explique que très souvent les deux principes sont évoqués ensemble. La laïcité exige ce faisant un service public fonctionnant à l’abri des croyances et un traitement des usagers du service public sans égard pour leur religion. Néanmoins, la neutralité ne saurait porter préjudice au pluralisme des courants de pensées et d’opinions. Il faut se souvenir ici du message du Conseil constitutionnel selon lequel l’État doit reconnaître toutes les opinions en respectant une certaine diversité étant entendu que le pluralisme des courants de pensées et d’opinions est un objectif à valeur de constitutionnelle[2].

Neutralité avec traitement favorable ou discrimination positive. — Parfois, la neutralité ne réclame pas d’égalité. Au contraire, elle impliquera de prendre en considération l’opinion pour établir des traitements différenciés. La situation revient à tenir compte de l’opinion politique ou religieuse pour appliquer un traitement favorable. La discrimination est plutôt « positive » car on agit en fonction de l’opinion ou de la croyance. Certains systèmes juridiques le présentent comme un accommodement raisonnable en ce que le service rendu est adapté afin de se montrer arrangeant envers les usagers. Les exemples relatifs à l’abattage des animaux et aux menus de substitution dans les cantines scolaires sont éloquents de ce point de vue.

α. Premier exemple : l’abattage des animaux en conformité avec les règles religieuses

La prise en compte de la religion est sans ambiguïté dans ce cas de figure. Déjà dans un arrêt du CE, 27 mars 1936, Association culturelle israélite de Valenciennes[3], puis dans un arrêt du CE, 5 juillet 2013, œuvres d’assistance aux bêtes d’abattoirs[4], le juge administratif considère « que la disposition contestée a été édictée dans le but de concilier les objectifs de police sanitaire et l’égal respect des croyances et traditions religieuses […] Il résulte du principe de laïcité que celui-ci impose l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et le respect de toutes les croyances, ce même principe impose que la République garantisse le libre exercice des cultes ; que, par suite, la possibilité de déroger à l’obligation d’étourdissement pour la pratique de l’abattage rituel  ne porte pas atteinte au principe de laïcité ».

β. Second exemple : les menus de substitution dans les cantines scolaires

Prévoir un menu sans porc est-il contraire à la neutralité religieuse de l’État puisqu’il est manifeste qu’on agit en fonction de la religion ? N’est-ce pas porter atteinte au principe de laïcité que de proposer des plats différents ? N’est-ce pas une discrimination religieuse entre les élèves ? Il y a quelques mois, le Conseil d’État a répondu par la négative en jugeant qu’il n’est ni obligatoire ni interdit pour les collectivités territoriales de proposer aux élèves des repas différenciés leur permettant de ne pas consommer des aliments proscrits par leurs convictions religieuses : « S’il n’existe aucune obligation pour les collectivités territoriales gestionnaires d’un service public de restauration scolaire de distribuer à ses usagers des repas différenciés leur permettant de ne pas consommer des aliments proscrits par leurs convictions religieuses, et aucun droit pour les usagers qu’il en soit ainsi, dès lors que les dispositions de l’article 1er de la Constitution interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers, ni les principes de laïcité et de neutralité du service public, ni le principe d’égalité des usagers devant le service public, ne font, par eux-mêmes, obstacle à ce que ces mêmes collectivités territoriales puissent proposer de tels repas. Lorsque les collectivités ayant fait le choix d’assurer le service public de restauration scolaire définissent ou redéfinissent les règles d’organisation de ce service public, il leur appartient de prendre en compte l’intérêt général qui s’attache à ce que tous les enfants puissent bénéficier de ce service public, au regard des exigences du bon fonctionnement du service et des moyens humains et financiers dont disposent ces collectivités »[5]. Le Conseil d’État valide au passage le raisonnement reposant sur l’intérêt supérieur de l’enfant lorsqu’on envisage de supprimer les menus de substitution. Il faudra donc mettre en balance les intérêts en présence.

Encore plus de neutralité : vers un point d’acmé. — La neutralité, en dépit de sa proximité avec le principe d’égalité et la laïcité, demeure un principe autonome car la neutralité de l’État a une valeur constitutionnelle[6]. Plus précisément, c’est la neutralité du service public que le Gouvernement actuel souhaite renforcer, sinon en étendre l’applicabilité. L’article 1er du projet de loi pour conforter le respect des principes de la République est à cet égard probant. L’adoption du texte est en bonne voie. Le Conseil d’État a rendu son avis en date du 3 décembre 2020. Le projet a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, le 9 décembre 2020, et la procédure accélérée déclenchée à cette même date par le Gouvernement. Pour l’heure, le texte a été adopté en première lecture par la Chambre basse le 16 février 2021 et renvoyé à la Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale. La navette se poursuit encore mais le moment est opportun pour faire un état des lieux et anticiper l’après. Il ne fait aucun doute que le principe de neutralité en sortirait renforcé. Pour le schématiser, on parlera de « moyen format », pour sa version actuelle (I) et de « grand format » pour sa version à venir en cas d’adoption du texte (II).

I. Le « moyen format » actuel du principe de neutralité du service public

Deux ressorts seront mobilisés pour parcourir le principe de neutralité tel qu’il se présente aujourd’hui dans le paysage juridique français. Le fil directeur est la protection : protection d’une part de la liberté de conscience du jeune public (A) et protection d’autre part des agents et des usagers contre les discriminations dans le service public (B).

A. La protection de la liberté de conscience du jeune public

« Les écoles doivent rester l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas ». Jean Zay.

Pourquoi les écoles accueillant du jeune public et les établissements de l’enseignement supérieur ne peuvent être logés à la même enseigne ? — Un arrêt du CE du 10 mai 1912, Abbé Bouteyre, illustre bien cette citation. En 1911, l’abbé Bouteyre, prêtre de l’église catholique, s’inscrit sur la liste des candidats au concours d’agrégation de philosophie de l’enseignement secondaire. Le 8 juin 1911, le vice-recteur de l’Université de Paris l’informe que le ministre de l’instruction publique refuse de l’admettre à ce concours au motif que « l’état ecclésiastique auquel il s’est consacré s’oppose à ce qu’il soit admis dans le personnel de l’enseignement public, dont le caractère est la laïcité, et que, par suite, il n’y avait pas lieu de l’autoriser à prendre part aux épreuves destinées à pourvoir au recrutement des lycées ». Dans la lettre qui notifie à l’abbé Bouteyre la décision du ministre de l’instruction publique, le vice-recteur indique que la mesure prise à son égard n’est que l’application d’une pratique établie par le ministre depuis plusieurs années. En effet, depuis le mois de juin 1904, le ministre raye de la liste des candidats au concours d’agrégation d’histoire de l’enseignement secondaire un certain nombre de prêtres catholiques. L’abbé Bouteyre estime qu’en agissant ainsi le ministre de l’instruction publique frappe d’une véritable incapacité les prêtres catholiques, violant les dispositions de la loi du 9 décembre 1905. Face à ce qu’il considère comme un excès de pouvoir, il demande l’annulation de la décision.

Les conclusions du Commissaire du gouvernement sont édifiantes dans cette affaire (les voir en note, elles sont très instructives) : le principe de neutralité ne s’applique pas de la même manière à un jeune public et à un public en âge de discernement. S’agissant d’un jeune public, le principe s’applique avec une grande sévérité car l’enseignant s’adresse à des jeunes gens dont l’esprit n’a pas encore les capacités nécessaires de juger les enseignements qui leur sont donnés et de juger les doctrines enseignées. L’enseignement doit donc être le plus neutre possible afin d’éviter que le service public de l’enseignement ne soit instrumentalisé au service d’une politique ou d’une idéologie. L’école ne doit favoriser la propagation, vers de jeunes élèves particulièrement influençables, d’aucune doctrine religieuse ou politique[7].

Attention toutefois à la frontière entre la liberté de conscience du jeune public et la diffusion des messages civiques. — La neutralité ne saurait non plus être poussée à l’extrême. On voit difficilement en quoi la diffusion d’un message civique serait mécaniquement une atteinte à la neutralité de l’enseignement dispensé dans les écoles. C’est par exemple davantage de l’ordre du civisme que du principe de neutralité de lutter contre les préjugés sexistes à l’école[8].

Pour autant, les choses ne sont pas toujours aussi simples que cela. L’on ne peut au prétexte du civisme diffuser tout message. C’est la raison pour laquelle lorsque la loi ne permet pas de mettre en relief le caractère civique d’un message, il appartient au juge administratif de surveiller la frontière entre le domaine du message civique et le domaine du principe de neutralité. Plus généralement, il faudra regarder la nature des sujets discutés. À certains sujets, comme la religion, on pourra plus facilement opposer le principe de neutralité plus qu’à d’autres, en l’occurrence l’éducation sexuelle, le sexisme et le racisme. Le Conseil d’État a ainsi pu considérer qu’une campagne d’information sur les maladies sexuellement transmissibles ne portait pas atteinte au principe de neutralité. Or, si une campagne de sensibilisation à la contraception est permise, on sort de la neutralité si cette campagne incite à adopter un comportement sexuel en particulier. Il y a, aux yeux du juge, une distinction entre le message civique et les messages incitatifs. Le problème s’est également posé à l’occasion d’une campagne d’information contre l’homophobie. Le ministre de l’éducation avait adopté un texte destiné à tous les recteurs les incitant à soutenir cette campagne d’information. La Confédération nationale des associations familiales catholiques forme un recours. Le Conseil d’État considère « qu’en application de ces textes et en complément de leur mission d’enseignement, les autorités chargées du service public de l’éducation nationale doivent apporter aux élèves de l’enseignement public une information relative à la lutte contre les discriminations fondées notamment sur l’orientation sexuelle, information pour laquelle elles peuvent avoir recours à l’intervention d’associations spécialisées en la matière ; que l’information ainsi apportée doit être adaptée aux élèves auxquels elle est destinée, notamment à leur âge, et être délivrée dans le respect du principe de neutralité du service public de l’éducation nationale et de la liberté de conscience des élèves »[9]. En revanche, la circulaire viole le principe de neutralité car elle mentionne la drogue, la pédophilie sans déclarer que cela est illégal.

D’un mot, ce qu’il faut retenir c’est que le principe de neutralité refuse de privilégier une idéologie dans l’enseignement public primaire et secondaire afin de ne pas imposer au jeune public une vérité religieuse, philosophique et politique. La situation se présente cependant autrement pour les autres services publics.

B. La protection des agents et des usagers contre les discriminations dans le service public

Mais de quels agents et de quel secteur parle-ton initialement ? — La loi du 20 avril 2016[10] impose aux agents publics une obligation de neutralité et une obligation de laïcité. Cette neutralité se présente sous un double aspect. D’un côté, elle les protège : ainsi, le principe de neutralité, en lien avec l’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, interdit de tenir compte de toute autre considération que celles tirées de la vertu et du talent des candidats. De l’autre côté, le principe de neutralité fait peser sur l’agent une obligation pendant le déroulement de sa carrière et l’exercice de sa fonction : les agents publics sont tenus de s’abstenir de montrer leurs convictions religieuses. On se souvient que dans un avis du 3 mai 2000, Mademoiselle Marteaux, le Conseil d’État indiquait que les agents du service public de l’éducation n’ont pas le droit de montrer leurs convictions religieuses qu’il s’agisse d’enseignants ou pas. Le même principe vaut pour les autres services publics[11].

Dans ce même avis, le Conseil d’État précise que « les suites à donner à ce manquement, notamment sur le plan disciplinaire, doivent être appréciées par l’administration sous le contrôle du juge, compte tenu de la nature et du degré de caractère ostentatoire de ce signe, comme des autres circonstances dans lesquelles le manquement est constaté »[12]. C’est ce qu’il ressort d’un arrêt de la CEDH, 26 novembre 2015, Ebrahimiam c. France, dans lequel une assistante sociale d’un hôpital public a été renvoyée à cause de son refus d’ôter son voile. La Cour européenne des droits de l’Homme admet que l’injonction faite à un agent d’ôter un signe manifestant une appartenance religieuse peut ne pas porter atteinte à l’article 9 de la CEDH relatif au droit à la liberté de manifester sa religion. Elle confirme donc le licenciement de l’agent pour violation du principe de neutralité[13]. Et même, le caractère sensible du service public peut justifier une application plus sévère du principe de neutralité. La Cour « observe que l’hôpital est un lieu où il est demandé également aux usagers, qui ont pourtant la liberté d’exprimer leurs convictions religieuses, de contribuer à la mise en œuvre du principe de laïcité en s’abstenant de tout prosélytisme et en respectant l’organisation du service et les impératifs de santé et d’hygiène en particulier ; en d’autres termes, la réglementation de l’État concerné y fait primer les droits d’autrui, l’égalité de traitement des patients et le fonctionnement du service sur les manifestations des croyances religieuses, ce dont elle prend acte »[14].

Par ailleurs, l’exigence de neutralité de l’agent public vise à protéger le service public de comportements de l’agent à l’égard des usagers qui seraient le reflet de ses opinions et de ses croyances. Dans l’octroi de la prestation, l’agent ne doit établir aucune discrimination entre les usagers fondée sur leurs opinions politiques, religieuses, philosophiques. Il doit de surcroît s’abstenir de tenir certains propos, à l’instar de propos négationnistes, sexistes ou racistes. On voit venir ici la question de la frontière entre le principe de neutralité et la liberté d’expression de l’agent.

Toutes ces règles concernent le service public et non les agents soumis au droit du travail et travaillant dans des secteurs étrangers au service public  car « le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public ; qu’il ne peut dès lors être invoqué pour les priver de la protection que leur assurent les dispositions du Code du travail ; qu’il résulte des articles L. 1121-1, L. 1132-1, L. 1133-1 et L. 1321-3 du Code du travail que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et proportionnées au but recherché »[15]. La neutralité religieuse est une obligation qui concerne au premier rang les agents publics et les agents privés exerçant une mission de service public. Elle ne doit donc pas faire oublier que l’article 1erde la loi de 1905 assure la laïcité et la liberté religieuse des individus.

Pourquoi les usagers du service public se voient-ils appliquer le principe de neutralité ? — Si les usagers du service public sont concernés par le principe de neutralité, c’est pour des raisons de bon fonctionnement du service. Chacun sait qu’initialement dans l’enseignement primaire et secondaire les usagers avaient le droit d’exprimer leurs convictions religieuses. Progressivement cependant, le juge administratif a indiqué que leurs croyances ne devaient pas perturber le bon fonctionnement du service.

Il faut repartir du service public de l’éducation avec le célèbre avis du Conseil d’État du 27 novembre 1989, Port du foulard islamique: « Dans les établissements scolaires, le port par les élèves de signes par lesquels ils entendent manifester leur appartenance à une religion n’est pas par lui-même incompatible avec le principe de laïcité, dans la mesure où il constitue l’exercice de la liberté d’expression et de manifestation de croyances religieuses, mais que cette liberté ne saurait permettre aux élèves d’arborer des signes d’appartenance religieuse qui, par leur nature, par les conditions dans lesquelles ils seraient portés individuellement ou collectivement, ou par leur caractère ostentatoire ou revendicatif, constitueraient un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de propagande, porteraient atteinte à la dignité ou à la liberté de l’élève ou d’autres membres de la communauté éducative, compromettraient leur santé ou leur sécurité, perturberaient le déroulement des activités d’enseignement et le rôle éducatif des enseignants, enfin troubleraient l’ordre dans l’établissement ou le fonctionnement normal du service public. Le port de signes d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires peut, en cas de besoin, faire l’objet d’une réglementation destinée à fixer les modalités d\’application des principes qui viennent d’être définis »[16]. La loi du 15 mars 2004 prolonge les principes dégagés par la jurisprudence en disant que dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes religieux est interdit. L’interdiction n’est cependant pas applicable aux établissements supérieurs[17].

Cela étant dit, il faut donc réfléchir à un cadre juridique pour les collaborateurs occasionnels du service public ? — La question est simple : doit-on appliquer le principe de neutralité aux collaborateurs occasionnels du service public ? La réponse est loin d’être évidente.

D’emblée, on pourrait écarter le débat et dire que collaborateurs occasionnels ne rentrent pas dans l’une des catégories juridiques soumises à ce principe : ils ne sont ni des agents du service public ni des usagers dudit service. C’est une notion fonctionnelle qui permet le déclenchement d’un régime de responsabilité pour risque en cas de dommages subis par ledit collaborateur.

On pourrait en revanche invoquer l’argument de la neutralité religieuse pour le jeune public. La question est née d’une affaire dans laquelle des mères d’élèves, accompagnant une sortie scolaire, s’étaient présentées avec le foulard islamique. Peut-on alors considérer que le voile islamique porté par un collaborateur scolaire ne respecte pas la neutralité de l’école laïque ? La frontière entre la question juridique et le débat de société est ténue : quelle tenue dans le service public ?

C’est dire à quel point la solution est particulièrement difficile pour les collaborateurs occasionnels du service public : il faut concilier la neutralité, la laïcité et le respect par l’État du pluralisme religieux. Et si pour résoudre juridiquement la question on faisait prévaloir dans l’argumentaire les principes de laïcité et de neutralité du service public ? On assimilerait ce faisant le collaborateur occasionnel à l’agent public. Il se créerait toutefois un déséquilibre : si le collaborateur occasionnel est soumis aux obligations de l’agent, il faudrait peut-être songer à faire évoluer son statut et lui reconnaître les droits qui vont avec le statut d’un agent. Doit-on alors envisager l’émergence d’une troisième catégorie de « collaborateur » ou de « participant » à côté de l’agent ou de l’usager du service public ? On n’en est pas encore là. Pour l’heure on souhaite surtout renforcer le principe de neutralité du service public en lui donnant une plus grande envergure.

II. Le « grand format » à venir du principe de neutralité du service public

Le Gouvernement veut réagir aux violations du principe de neutralité au sein des organismes chargés d’une mission de service public. Sont donc visés les organismes de droit public ou de droit privé à qui la loi ou le règlement confie l’exécution d’une mission de service public et les organismes de droit public ou de droit privé assurant en vertu d’un contrat l’exécution d’une mission de service public. Dans l’un et l’autre cas, il importe peu qu’ils emploient des salariés soumis au droit du travail. Pour bien comprendre ce dont il s’agit, on distinguera les habilitations unilatérales législative et réglementaire (A) de la délégation contractuelle à exercer une mission de service public (B).

A. Acter l’applicabilité du principe de neutralité du service public aux habilitations unilatérales législative et réglementaire

Ce qu’il faut avoir à l’esprit : seule la mission de service public importe, on n’en a cure de la nature de l’organisme. — Pour avoir une idée précise de ce dont il s’agit, en dehors des entreprises de transport public qui figurent au premier rang, on peut ranger dans cette catégorie les caisses locales de sécurité sociale, les missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes, etc.

Au fond, il est question de dire que la nature de l’organisme – de droit public ou de droit privé – est sans incidence sur l’applicabilité du principe de neutralité. On ne doit s’attacher qu’à la nature de l’activité exercée : dès lors que c’est une mission de service public, rien ne justifie que l’organisme, même s’il est de droit privé, déroge aux obligations du principe de neutralité. Le Conseil d’État dans son avis valide cette lecture en relevant que les principes jurisprudentiels que le législateur a codifié pour les agents publics[18] « ont [pourtant] été dégagés par la jurisprudence indépendamment de la nature de l’entité chargée de l’exécution du service public et du statut de son personnel. Le fait que le service public soit confié à une personne privée ne change pas la nature des obligations inhérentes à l’exécution du service public »[19].

Si l’on parle d’acter le principe de neutralité du service public, c’est parce que le Conseiller du prince relève qu’il n’y a rien d’innovant à cela : le 19 mars 2013, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononçant dans deux arrêts au sujet d’une caisse primaire d’assurance maladie décidait que « les principes de neutralité et laïcité du service public sont applicables à l’ensemble des services publics, y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes de droit privé »[20]. Comme le précise la Cour de cassation dans ses arrêts et dans le communiqué qui les accompagnent : « si les dispositions du Code du travail ont vocation à s’appliquer aux agents des caisses primaires d’assurance maladie, ces derniers sont toutefois soumis à des contraintes spécifiques résultant du fait qu’ils participent à une mission de service public, lesquelles leur interdisent notamment de manifester leurs croyances religieuses par des signes extérieurs, en particulier vestimentaires »[21]. Ainsi, la salariée portant le voile islamique laissant voir le visage mais couvrant les cheveux contrevient à une disposition du règlement intérieur. C’est dire aussi, et le Conseiller du prince le souligne, que les jurisprudences en cette matière de la Cour de justice de l’Union européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme s’appliquent à ces organismes de droit privé.

Le Gouvernement peut donc être rassuré : sur ce point, le Conseiller du prince lui fait savoir qu’il n’encourt pas de censure devant le juge de l’excès de pouvoir en cas de contentieux. Ainsi, « le projet du Gouvernement a pour objet de mieux garantir le respect [du principe de neutralité] lorsque l’exécution d’une mission de service public est confiée à une entreprise privée ou à un organisme de droit public employant des salariés soumis au droit du travail. Compte tenu des manquements à ce principe régulièrement constaté, cités dans l’étude d’impact, [le Conseil d’État] admet l’utilité de ces dispositions et s’efforce de renforcer leur effectivité »[22].

Un domaine des personnes concernées très étendu par un effet d’entraînement. — Dire que le principe de neutralité s’appliquera aux organismes qui reçoivent une habilitation unilatérale législative ou réglementaire à exécuter une mission de service signifie que sont logiquement concernés les salariés de ces organismes. Par effet d’entrainement, les obligations du principe de neutralité s’étendent aux personnes sur lesquelles ces organismes exercent une autorité hiérarchique ou un pouvoir de direction de même que toute autre personne à laquelle ces organismes confient pour partie l’exécution du service public. Les contrats de la commande publique ne pouvaient ainsi échapper à la réforme.

B. Injecter du principe de neutralité du service public dans les contrats de la commande publique

La vulgarisation trouve ici ses limites pour les étudiants de L1 et L2. Ce point requiert quelques bases en droit des contrats administratifs. Mais voyons le bon côté : cela donne un peu d’avance.

Les justifications possibles. — Le respect du principe de neutralité s’imposera également au titulaire d’un contrat de la commande publique selon qu’il exécute la mission de service public ou que le contrat qui lui est confié participe à la réalisation de la mission de service public. La nuance s’impose pour intégrer la différence de logique qui existe entre le marché public et la concession quand bien même le texte gouvernemental ne l’intègre pas. Dans un marché public classique, le titulaire du marché n’exécute pas à proprement parler une mission de service public puisqu’il s’agit de répondre aux besoins de l’acheteur. Il semblerait cependant dans l’esprit du texte qu’on veuille plus généralement s’assurer que les organismes qui répondent à l’appel d’offre d’un acheteur chargé d’exécuter une mission de service public respectent les prescriptions du principe de neutralité. De façon triviale, l’idée est que l’acheteur ne se lie contractuellement qu’avec des organismes qui respectent les principes de la République. C’est pour cette raison que le projet de loi impose que le contrat rappelle les obligations de neutralité et en prévoit les modalités de sanction. Pour les contrats de concession, l’applicabilité du principe de neutralité se justifie plus facilement puisque le concessionnaire réalise la prestation pour satisfaire les besoins des usagers du service public[23].

La faisabilité. — Ces nouvelles dispositions soulèvent néanmoins des interrogations et posent quelques difficultés.

α. Des interrogations : un nouveau critère de choix et d’attribution des offres ?

On sait que les contrats de la commande publique obéissent à des critères de choix des offres et des critères d’attribution. Est généralement retenue l’offre économiquement la plus avantageuse en tenant compte soit exclusivement du prix ou du coût[24] soit cumulativement de la qualité globale de l’offre (valeur technique, caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles conditions de production et de commercialisation, etc.), des délais d’exécution, des conditions de livraison, l’organisation, les qualifications, l’expérience du personnel, les critères environnementaux[25]. La question qui se pose désormais est celle de savoir si le respect des obligations du principe de neutralité deviendra l’un des critères d’attribution du contrat ?

β. Des difficultés : comment et quand implémenter le dispositif ?

Il est possible d’identifier deux niveaux de difficultés.

La première, on s’éloigne de la logique économique que recouvre l’offre économiquement la plus avantageuse et on introduit une logique non économique qui expose l’acheteur ou l’autorité concédante à une accusation de discrimination. En prévision, le Conseiller du prince attire l’attention, sinon qu’il met en garde le Gouvernement : « S’agissant des dispositions du projet de loi relatives aux titulaires d’un contrat de la commande publique, le Conseil d’État souligne qu’elles n’ont pas pour objet ou ne sauraient avoir pour effet d’écarter un candidat à la passation d’un tel contrat au seul motif qu’il s’agirait d’un organisme, association ou autre, se réclamant d’un courant de pensée ou d’inspiration confessionnelle »[26].

La seconde difficulté est relative à la sécurité juridique des contrats légalement conclus[27]. Concrètement, comment parvenir à une applicabilité de ces dispositions aux procédures contractuelles en cours sans porter une atteinte excessive à la liberté contractuelle ? Le Gouvernement a prévu un délai de mise en conformité de vingt-quatre mois à compter de la publication de la loi. Échappent toutefois à cette mise en conformité les contrats dont le terme intervient dans les trente-six mois suivant la date de publication de la présente loi. Pour le Conseiller du prince, « en prévoyant leur application aux contrats en cours et à ceux pour lesquels une consultation est engagée ou un avis de publicité est envoyé à la publication à la date de publication de loi, sauf si leur terme doit intervenir dans moins de trente-six mois à compter de cette date, avec un délai de mise en conformité de vingt-quatre mois, ces dispositions permettent, sans atteinte excessive à la liberté contractuelle, de ne pas trop différer l’entrée en vigueur de cette mesure, certains contrats pouvant être conclus pour une période longue »[28].

Ce tour d’horizon laisse peut-être de côté certains aspects : peut-on par exemple prier dans les locaux d’une université, notamment dans les toilettes ? La question divise encore la doctrine et augure probablement de nouvelles perspectives jurisprudentielles. Sur quel terrain se placer : celui de l’ordre public ? Celui du fonctionnement du service ? Celui, novateur, de l’affectation des locaux de l’université au service public de l’enseignement en convoquant donc la domanialité publique dans le débat ? Pour l’heure, chacun sait désormais ce qu’implique le principe de neutralité du service public et ce qu’il adviendrait avec l’entrée en vigueur de l’article 1er du projet de loi en discussion. Il ne reste plus qu’à se faire sa propre opinion – en toute neutralité !


[1] Voir le rapport du CE de 2004 « Un siècle de laïcité ». https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiB9dm7rI3vAhVUNuwKHXxxC3EQFjABegQIBRAD&url=https%3A%2F%2Fwww.conseil-etat.fr%2Fressources%2Fetudes-publications%2Frapports-etudes%2Fetudes-annuelles%2Fun-siecle-de-laicite-rapport-public-2004&usg=AOvVaw01QxaNb2c8TLWndlSu47Vc

 Voir aussi en complément l’intervention de J.-M. Sauvé, « Laïcité et République ». https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiche3Sq43vAhXzwAIHHT_CB_MQFjABegQIBBAD&url=https%3A%2F%2Fwww.conseil-etat.fr%2Factualites%2Fdiscours-et-interventions%2Flaicite-et-republique&usg=AOvVaw2n9fA6eziez_MBhDgZdmM_

[2] Cons. Const., déc. n° 2010-3 QPC du 28 mai 2010, Union des familles en Europe, JORF du 29 mai 2010, p.  9730, Rec., p. 97. Voir cons. 6 et s.

[3] Rec. p. 385.

[4] Déc. n° 361441, cons. 5.

[5] CE, 10 décembre 2020, req. n° 426483, cons. 6, 7 et 8.

[6] Cons. const., déc. n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité,  JORF du 23 février 2013, p. 3110, Rec., p. 293.

[7] « L’intérêt du service s’oppose à ce que des ecclésiastiques soient admis dans les cadres de l’enseignement secondaire public. Cet enseignement doit être laïque, et l’État est responsable des doctrines qui y sont enseignées. Doit-on appliquer les mêmes règles, sinon les mêmes principes, pour l’enseignement supérieur public, et, doit-on dire que, là aussi, l’intérêt du service commande au ministre de ne pas laisser donner au nom de l’État un enseignement qui ne soit d’une neutralité absolue ? Nous ne le pensons pas, [dit M. le Commissaire du gouvernement] ; la nature de l’enseignement donné, le caractère des personnes auxquelles il s’adresse, dispense, en principe, l’État de prendre, comme dans les autres ordres d’enseignement, la responsabilité des doctrines qui sont enseignées. Les auditeurs, les élèves, sont ici en âge de juger l’enseignement qui leur est donné. L’incompatibilité entre cet enseignement, ou, tout au moins, entre certaines parties de cet enseignement et l’état ecclésiastique, n’a donc plus les mêmes raisons d’être. La foi religieuse, les dogmes des Églises, s’accordent parfaitement avec le culte des lettres ou le goût des recherches scientifiques, et, comme l’a fait remarquer le requérant dans son mémoire, un évêque, un rabbin, enseignent dans des chaires publiques à Paris, et un éminent prélat dirige aujourd’hui l’Académie de France, à Rome ».

Voir également le rapport sénatorial ci-après :  https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiNk9-8sY3vAhUC_KQKHXZjD5EQFjADegQIAhAD&url=https%3A%2F%2Fwww.senat.fr%2Frap%2Fl03-219%2Fl03-2193.html&usg=AOvVaw3juRG_olTjKY5u6LPORpta

[8] Voir par exemple la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. JORF n°0158 du 10 juillet 2010.

[9] CE, 15 octobre 2014, Société Confédération nationale des associations familiales catholiques, déc. n° 369965.

[10] Loi n° 2016-483.

[11] CE, Avis R/6SSR du 3 mai 2000, n° 217017 : « Il résulte des textes constitutionnels et législatifs que le principe de liberté de conscience ainsi que celui de la laïcité de l’État et de neutralité des services publics s’appliquent à l’ensemble de ceux-ci. Si les agents du service de l’enseignement public bénéficient comme tous les autres agents publics de la liberté de conscience qui interdit toute discrimination dans l’accès aux fonctions comme dans le déroulement de la carrière qui serait fondée sur leur religion, le principe de laïcité fait obstacle à ce qu’ils disposent, dans le cadre du service public, du droit de manifester leurs croyances religieuses. Il n’y a pas lieu d’établir une distinction entre les agents de ce service public selon qu’ils sont ou non chargés de fonctions d’enseignement. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le fait pour un agent du service de l’enseignement public de manifester dans l’exercice de ses fonctions ses croyances religieuses, notamment en portant un signe destiné à marquer son appartenance à une religion, constitue un manquement à ses obligations ».

[12] Avis du 3 mai 2000, préc.

[13] Décision ici : http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-158878. Voir cons. 60 et s., particulièrement cons. 66, 67 et 68. 66 : « La question principale qui se pose en l’espèce est donc celle de savoir si l’État a outrepassé sa marge d’appréciation en décidant de ne pas renouveler le contrat de la requérante. À cet égard, la Cour constate qu’en France, les agents du service public bénéficient du droit au respect de leur liberté de conscience qui interdit notamment toute discrimination fondée sur la religion dans l’accès aux fonctions ou dans le déroulement de leur carrière. Cette liberté est spécialement garantie par l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et doit se concilier avec les nécessités du fonctionnement du service. Il leur est cependant interdit de manifester leurs croyances religieuses dans l’exercice de leurs fonctions. L’avis du 3 mai 2000 précité énonce ainsi clairement que la liberté de conscience des agents doit se concilier, exclusivement du point de vue de son expression, avec l’obligation de neutralité. La Cour réitère qu’une telle limitation trouve sa source dans le principe de laïcité de l’État, qui, selon le Conseil d’État, ‘‘intéresse les relations entre les collectivités publiques et les particuliers’’, et de celui de neutralité des services publics, corollaire du principe d’égalité qui régit le fonctionnement de ces services et vise au respect de toutes les convictions.

67.  Or la Cour souligne qu’elle a déjà approuvé une mise en œuvre stricte du principe de laïcité (désormais érigée au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit) et de neutralité lorsqu’il s’agit d’un principe fondateur de l’État, ce qui est le cas de la France. Le principe de laïcité et de neutralité constitue l’expression d’une règle d’organisation des relations de l’État avec les cultes, qui implique son impartialité à l’égard de toutes les croyances religieuses dans le respect du pluralisme et de la diversité. La Cour estime que le fait que les juridictions nationales ont accordé plus de poids à ce principe et à l’intérêt de l’État qu’à l’intérêt de la requérante de ne pas limiter l’expression de ses croyances religieuses ne pose pas de problème au regard de la Convention.

68.  Elle observe à cet égard que l’obligation de neutralité s’applique à l’ensemble des services publics, ainsi que l’ont maintes fois rappelé le Conseil d’État et la Cour de cassation récemment, et que le port d’un signe d’appartenance religieuse par les agents dans l’exercice de leurs fonctions constitue, par principe, un manquement à leurs obligations ».

[14] Décision préc., cons. 71.

[15] Cass. soc., 19 mars 2013, Association Baby Loup, Arrêts n° 536 et 537 du 19 mars 2013. https://www.courdecassation.fr/article25762 et https://www.courdecassation.fr/article25763.

[16] CE, Ass. gén., avis n° 346.893.

[17] Voir le dossier législatif ci-après : https://www.legifrance.gouv.fr/dossierlegislatif/JORFDOLE000017759496/

[18] Soit l’article 25 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016.

[19] Voir l’avis du Conseil d’État préc., spéc. p. 7.

[20] Cass. soc., arrêt n° 536 du 19 mars 2013 (11-28.845) – ECLI:FR:CCASS:2013:SO00536 et Cass. soc., arrêt n° 537 du 19 mars 2013 (12-11.690) – ECLI:FR:CCASS:2013:SO00537.

[21] Voir les arrêts et le communiqué ici : https://www.courdecassation.fr/article25761

[22] Voir l’avis du Conseil d’État du 3 décembre 2020, spéc. p. 7.

[23] Les justifications proposées ici pour le marché public et la concession s’alignent sur le fait dans le premier cas, il s’agit d’une logique d’achat et dans le second cas d’une logique concessive (Pour mémoire, ce sont les arrêts classiques : CE, 15 mai 2013, Ville de Paris ; CE, Ass., 4 novembre 2005, Société J.-C. Decaux).

[24] On parle donc d’un « critère unique ».

[25] On parle d’une « pluralité de critères non discriminatoires liés à l’objet du marché ».

[26] Voir l’avis du Conseil d’État préc., spéc. p. 8.

[27] Voir par exemple : Cons. const., déc. n° 98-401 DC du 10 juin 1998, Loi d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps du travail, JORF du 14 juin 1998, p. 9033, Rec., p. 258.

[28] Voir l’avis du Conseil d’État préc., spéc. p. 8-9.